Et si les JO nous invitaient à repenser notre rapport aux animaux ?




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On pense bien sûr d’abord à l’équitation, tout le monde se souvient de cette cavalière allemande, Annika Schleu, lors de l’épreuve de
pentathlon moderne des JO de Tokyo, qui avait rageusement cravaché et éperonné son cheval pendant que son entraîneuse assénait
des coups de poing à l’animal. Les protestations avaient été telles que l’Union internationale de pentathlon moderne avait fini par retirer
l’épreuve d’équitation, ce qui sera effectif dans quatre ans aux JO de Los Angeles. Rappelons qu’aujourd’hui encore, les chevaux sont
parfois euthanasiés après des chutes, ce qui n’est pas rare puisque les obstacles, dans l’épreuve de course de cross par exemple, sont
inamovibles. Aux derniers JO, le cheval Jet Set de l’équipe suisse avait ainsi été froidement tué.


Mais sur un plan plus philosophique, les Jeux olympiques, et plus généralement le sport de haut niveau, permettent de comprendre
comment l’immense majorité des humains se placent au-dessus des autres animaux. Ces grands moments de célébrations sportives, que
nous avons également vécus avec les coupes du monde de foot, ne servent pas que les pires instincts nationalistes et chauvins ou les
récupérations politiques les plus éhontées – on se souvient à ce titre du président Emmanuel Macron descendant de la tribune pour
enlacer Kylian Mbappé sur le terrain en 2022 après une finale perdue au Qatar.


Pensons aux hurlements les plus fréquents, « On a gagné ! », scandés en fin de match, au ravissement contenu dans « aujourd’hui on
a gagné cinq médailles dont deux en or ! ». Est-ce ainsi que nous faisons nation ? Cette union à travers les performances d’une part infime
de nos compatriotes n’est qu’illusoire. La célébration du « black-blanc-beur » associée à la victoire de l’équipe nationale de foot en 1998
ne nous a en rien prémunis contre la première présence de l’extrême droite au second tour de l’élection présidentielle, moins de quatre ans
plus tard. Ce « on » qui gagne, c’est le même que celui qui déclare la supériorité des humains sur les autres espèces, avec le droit afférent
de les maltraiter, parquer, mutiler, tuer et manger. C’est une forme particulière de spécisme, cette idéologie très largement partagée mais qui
semble si naturelle que peu de gens en sont conscients, qui stipule que l’appartenance à une espèce donnée justifie des considérations
morales particulières.


« On » a été sur la Lune, « on » a écrit des symphonies, « on » a construit des cathédrales… c’est ce qu’expliquent les humains qui maltraitent
des animaux en toute bonne conscience. Ils s’attribuent les qualités de quelques humains pour justifier leur prétendue supériorité, on parle
dans ce cas de spécisme attributif. Tous les grands médias affichent en temps réel le « compteur des médailles » avec l’or, l’argent, le bronze
et le nombre total obtenu par les meilleures nations. Mais à quoi bon ? Se rassurer sur la qualité de nos usines à champion ? Les Chinois
sélectionnent leurs futurs gymnastes à l’âge de quatre ans et les parquent dans des centres de formation avec une semaine par an pour voir
leur famille. Rien d’étonnant à ce que l’Empire du milieu mène la bataille des médailles. Au temps de la Guerre froide, on se souvient des
athlètes est-allemandes, non seulement dopées mais aussi mises enceintes et avortées avant les épreuves internationales, ou encore de la
petite Nadia Comăneci qui émerveilla l’Occident, peu regardant sur les insultes, punitions et coups que lui administrait son entraîneur, Béla
Károlyi… lequel fit d’ailleurs une brillante carrière aux États-Unis (voir le film Futurs champions, le prix de la gloire, réalisé par Pierre-Emmanuel
Luneau-Daurignac et disponible sur le site d’arte). Le nationalisme et le prétendu « vivre ensemble » générés par cette course aux médailles
est aussi illusoire que le spécisme attributif.


Enfin, de nombreuses épreuves des JO se rapprochent des épreuves subies par les animaux. Le point commun entre la corrida, la boxe et le
combat de coqs est évident, le plaisir de faire souffrir. Taper sur un être sentient, voire le tuer lorsqu’il s’agit d’animaux non humains, ne devrait
pas être considéré comme un loisir ni un sport. Et si les JO nous invitaient à repenser non seulement notre façon de faire nation mais également
notre rapport aux autres animaux ?